Rabbin Ovadia Yossef (1920 -2013) |
L'ancien grand rabbin - Séfarade - d'Israël s'est éteint ce lundi 7 octobre, à l'âge de 93
ans.
Son enterrement le jour même a eu lieu en présence de dizaines de milliers de
fidèles et de représentants du monde politique israélien, ce qui ne manque pas d'étonner en dehors d'Israël.
L'explication tient dans le fait que son rôle dans le jeune Etat hébreu dépassait celui d'un simple leader religieux.
Né à Bagdad en 1920, cet ancien président du grand tribunal rabbinique du
Caire est devenu grand rabbin de Tel-Aviv en
1968, puis grand rabbin séfarade d'Israël en 1973, fonction qu'il
exerça pendant dix ans.
C'est en cette qualité de grand rabbin qu'il prit quelques
décisions rabbiniques marquantes dans un Etat qui n'a pas encore totalement séparé l'Eglise et l'Etat et qui par ricochet furent politiques. La reconnaissance qu'il fit de la judaïté
des juifs éthiopiens, leur permit ainsi d'émigrer vers Israël, en accord avec la loi du retour.
Ovadia Yossef le leader du Shass
Au delà de ses fonctions rabbiniques, Ovadia Yossef est devenu célèbre pour avoir fondé le parti politique Shass qui fit une entrée remarquée à la Knesset (voir les résultats des différentes élections).
Car l'arrivée de ce parti ultra-orthodoxe au parlement aura profondément modifié l'image que le pays avait de lui-même. Auparavant dominé par l'élite Ashkenaze qui a fondé le pays, la création du parti Shass s'est fait en réaction à l'ostracisme dont souffraient les séfarades
(juifs orientaux) de la part des institutions religieuses ashkénazes
(juifs d'Europe de l'est) et ultraorthodoxes.
La parti s'est ainsi, dès sa création, donné pour mission de combattre
l'injustice et les discriminations historiques dont ont longtemps pâti
les séfarades, ce qu'il a parfaitement réussi. Ce faisant le parti a su séduire au delà de sa base électorale ultra-orthodoxe pour rassembler les séfarades
d'une façon plus large. Toute la frustration de la population
séfarade stigmatisée depuis son arrivée dans le pays (voir notre article sur le mouvement des black panthers israéliens) a su trouver en ce parti un protecteur de ses intérêts et un instrument de fierté.
Au fil du temps le Shass a su
ainsi devenir un allié
incontournable des coalitions gouvernementales, de droite comme de
gauche.
Ovadia Yossef un homme charismatique et de paradoxe
Certains de ses jugements provocateurs, conservateurs et mysogynes déclenchèrent de vives polémiques. Il affirma ainsi que les six millions de juifs disparus au cours de la Shoah sont morts parce
qu'ils avaient des âmes de pécheurs. Ses propos sur les "Arabes qui pullulent dans la Vieille ville de Jérusalem comme des fourmis" ou son jugement selon lequel "une femme sans fils ne vaut rien" ont ainsi contribué à ternir son image et sa réputation.
Paradoxalement c'est ce même "Rav" (rabbin) qui
se prononça
en faveur d'un accord de paix avec les Palestiniens et demanda aux députés Shass à la Knesset de ne pas s'opposer aux accords d'Oslo.
Ligne politique qui sur ce sujet s'inversa au cours des
années suivantes, Shass s'ancrant à droite et devenant un des membres du camp nationaliste.
Un avenir compliqué pour le Shass
Résultats des élections parlementaire 2013 |
La disparition de cette figure va poser
un difficile problème de succession au sein du parti.
La bataille va aujourd'hui s'engager pour sa succession entre le rabbin
Shlomo Amar, Aryeh Deri, président de Shass, Yitzhak Yossef, fils du
guide spirituel, qui est devenu en juillet grand rabbin (séfarade)
d'Israël, et enfin Shalom Cohen.
Le parti est en perte de
vitesse depuis qu'il a été écarté de la coalition après les élections de janvier 2013.
Car pour la première fois depuis 1984, les partis religieux ont été écarté du gouvernement où ils avaient acquis un siège quasi automatique du fait de leur résultats aux élections, à l'éducation notamment. La bataille qui s'était engagée entre eux et le camp laïque ces dernières années trouvera peut être une issue dans sa succession.
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