Avec Tel-avivre.com – Par Misha Uzan
Arlozorov (qu'on écrit aussi Arlosoroff ou Arlozoroff) est une des grandes avenues et artères du centre de Tel Aviv. Elle traverse la ville d'ouest en est, au nord de l'avenue Ben Gourion, de la mer à la gare centrale des trains, à la limite de Ramat Gan.
Haïm Arlozorov |
Comme toute grande artère à Tel Aviv, on y trouve de tout, tout le temps : restaurants, habitations, centres de soins, immeubles modestes et tours de luxe (Arlozorov 17 détiendrait le record de l'appartement le plus cher du pays, à 40 millions d'euros), mais aussi bars, cafés, la mer et l'intérieur des terres. Et comme les autres, elle est relativement bruyante puisque bus, shirout, taxis et voitures y défilent toute la journée, voire toute la nuit.
Mais c'est une grande artère qui porte le nom d'une grande figure du sionisme, d'un grand homme d'Israël, d'un homme politique mémorable et d'un leader du Mouvement des Travailleurs de l'époque (le Mapaï, l'ancêtre du parti Avoda).
Son nom complet est Vitaly Viktor Haïm Arlozorov. Né à Romny, en Ukraine, en 1899, il fut un grand politicien et sioniste socialiste, mais aussi poète et directeur de l'Agence juive avant Ben Gourion. Arlozorov milita dès sa jeunesse au sein des mouvements ouvriers lors des nombreuses conférences internationales et congrès sionistes. Il finit par s'installer au pays d'Israël en 1921, après une éducation en Allemagne.
Haïm Arlozorov fut un leader montant du parti Mapaï. Il fut à l'origine de la formation du parti, union de deux grands mouvements ouvriers, le Poale Zion et Hapoël Hatzaïr. On dit de lui qu'il aurait pu aller loin, très loin à l'intérieur du parti et donc de la direction de l'Agence juive, du Yishouv puis de l'Etat d'Israël. On lui doit aussi l'accord Ha'avara très controversé sur la venue des Juifs allemands en terre d'Israël à l'arrivée des nazis au pouvoir. Arlozorov était aussi un concurrent direct de Ben Gourion quant au leadership du parti et du Yishouv. Mais ses rêves furent brisés en 1933, le 16 juin exactement, alors qu'il se promenait avec sa femme Sima sur une plage de Tel Aviv. Haïm Arlozorov y a été assassiné.
Aucun suspect n'a jamais été retrouvé pour ce meurtre qui compte parmi les supposés crimes politiques de l'histoire de l'Etat naissant. Le Français Tobie Nathan y a consacré un ouvrage : Qui a tué Arlozoroff? Il y aborde en particulier l'intrigue du meurtre. Arlozorov n'a pas été tué par hasard, mais on ne sait toujours pas s'il le fut par un opposant politique du parti révisionniste de Jabotinsky, avec qui il avait des différends idéologiques et pratiques, une thèse longtemps soutenue, par un Arabe résolu à assassiner un leader juif du mouvement sioniste, ou par une personne de son propre camp, au sein du Mapaï, qui voyait d'un mauvais œil son succès, son charisme, son ascension. Reste une dernière thèse, liée à la vie d'Arlozorov en Allemagne. C'est là que le futur leader sioniste connut une amie de sa sœur Lisa : la future Magda Goebbels, future nazie et femme du ministre de la propagande d'Hitler. Il eut avec elle une forte liaison amoureuse, sans doute la première de leurs deux vies. Joseph Goebbels lui-même a peut-être voulu empêcher que s'ébruite l'aventure de sa femme avec un Juif, célèbre qui plus est.
Assassiné, Arlozorov termina là sa carrière politique, de poète et d'écrivain. Il ne devint jamais le grand leader national qu'on voyait en lui. Il n'en reste pas moins l'un des grands noms de l'histoire moderne d'Israël, avec Nordau, Jabotinsky, Rothschild, Ben Gourion ou Herzl, qui forment les grandes avenues de Tel Aviv.
Tel-avivre.com – Par Misha Uzan
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