Edgar Keret fait partie de ces écrivains israéliens connaissant plus qu’un succès d’estime hors des frontières de leur pays. Il est connu au niveau mondial en général et français en particulier pour ses recueils de nouvelles et pour son humour.
7 années de bonheur est la parfaite synthèse de son œuvre. C’est une sorte de description de sa vie durant les 7 ans qui commencent à la naissance de son fils Lvev. Chaque année est une suite de petites chroniques retraçant la vie quotidienne de l’auteur, son environnement, ses questionnements.
Nous sommes en Israël et plus particulièrement à Tel-Aviv, donc dans un pays menacé continuellement par des ennemis voulant sa destruction ce qui entraine des sortes de réflexes, voire une vraie culture pour se protéger, avec en même temps un certain fatalisme car il faut que la vie continue. On apprend ainsi que jouer au sandwich Pastrami est une façon comme une autre pour protéger son enfant des roquettes du Hamas.
En 7 ans Edgar Keret voyage, voyage beaucoup essentiellement pour faire des lectures de ses nouvelles : la Suède, Bali, la Sicile, Los Angeles, etc. et surtout la Pologne d’où ses parents sont originaires dont Varsovie, ville natale de sa mère, seule rescapée de sa famille du Ghetto. La Shoah est plus que présente, elle fait partie de la culture du pays, et Edgar Keret s’assume comme étant israélien et par voie de conséquence, dépositaire de cette culture. Il n’y a aucune haine vis-à-vis des allemands et des polonais, mais développe un certain fatalisme qui le pousse à se méfier d’eux. Pour autant il sait faire montre d’empathie, d’ouverture d’esprit pour comprendre que le passé est passé et que les allemands ou les polonais d’aujourd’hui ne sont pas responsables des crimes de leurs ancêtres. S’il nous livre des pages d’une très grande pudeur, beauté, sa carapace est l’humour et la dérision, il suffit de lire ce qu’il écrit sur Walt Disney : « ce n’était qu’un antisémite comme les autres qui haïssait les communistes et vouait une profonde affection aux allemands ».
Mais l’essentiel de ces chroniques portent plus sur cette vie quotidienne à Tel-Aviv avec ses chauffeurs de taxi qui indéniablement font passer ceux de Paris pour des anges d’une grande courtoisie ; sur sa vie comme écrivain ayant le temps de s’occuper de son fils, seul homme à amener sa progéniture au parc, ce qui le met dans des positions parfois cocasses. Et puis il y a sa famille, sa sœur devenue orthodoxe avec ses 11 enfants, son frère qui de religieux devient « baba-cool », sa mère, son père et son cancer de la langue. Tous sont décrits avec humour, par leurs travers ce qui ne nuit en rien à la profonde affection que l’auteur leur porte.
Mais en plus, Edgar Keret est un auteur qui réfléchit à son travail qui nous offre une parfaite définition du travail de l’Ecrivain : « Cette page n’était qu’un pipeline dans laquelle je pouvais transmettre mes sentiments et les sensations de mon esprit à celui du lecteur ».
A travers l’humour, Edgar Keret y parvient parfaitement. Plus d’un écrivain devrait méditer cette réflexion avant de commencer à écrire un mot sur une page blanche.
Émile COUGUT
Source : http://www.wukali.com/7-annees-de-bonheur-sous-l-humour-d-Edgar-Keret-auteur-israelien-1798#.VE_NT_msXD5
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