Aux sources du christianisme : Indiana Jones contre l'archéologie israélienne
par Mylène Sebbah pour Israelinfos.net
Un documentariste canadien persuadé que la dernière demeure de la famille et des disciples de Jésus ont été découverts il y a 30 ans à Jérusalem, accuse l'auteur de cette découverte, le Professeur Kloner de l'Université Bar Ilan de l'avoir caché, à dessein, dans le cadre d'un arrangement politico-religieux.
La controverse entre les deux hommes a resurgi jeudi lors d'une conférence archéologique à l'Université Bar Ilan.
Ce n'est pas le dernier épisode des Aventures d'Indiana Jones mais ça y ressemble.
D'un côté, l'establishment de l'archéologie israélienne représenté par l'Autorité israélienne des Antiquités et le professeur Amos Kloner, un "ponte" de l'Université Bar Ilan soutenu par différents archéologues et chercheurs respectés.
De l'autre (dans le rôle d'Indiana Jones?), Simcha Jacobovici, écrivain et cinéaste, soutenu lui aussi par un groupe d'archéologues et d'universitaires tout autant reconnus que les premiers.
Entre les deux hommes, deux tombeaux datant de l'époque des Romains découverts à Jérusalem il y a trente ans, l'un en 1980, l'autre en 1981, par le professeur Kloner, au cours de fouilles préliminaires à des travaux de construction.
C'est ce qu'il est convenu d'appeler aujourd'hui le tombeau de Talpiot, un caveau funéraire du 1er siècle.
Le Professeur Kloner n'a pu passer que quelques minutes à l'intérieur de la deuxième tombe avant d'en être chassé par un groupe de juifs orthodoxes qui s'opposaient à ce que l'on profane des tombes supposées juives.
Dans ce qu'il a pu inspecter, Kloner décrit un tombeau contenant les emplacements de dix ossuaires dont certains portent les inscriptions : "Yehoshua bar Yoseph" (Jésus fils de Joseph), "Miriam" et "Yehouda bar Yeshoua" (Juda fils de Jésus).
Seuls neuf ossuaires sont en place, le dixième est manquant. Le tombeau a ensuite été refermé et recouvert par la terrasse d'un appartement nouvellement construit.
Simcha Jacobovici s'est saisi de l'histoire, en a fait un film en collaboration avec James Cameron (M. Titanic), intitulé "La Tombe perdue de Jésus"; sa théorie affirme que la deuxième sépulture n'est autre que le tombeau de la famille de Jésus.
En effet, selon lui, les noms déchiffrés sur les ossuaires correspondent : Joseph, Marie, Jésus.
À quoi il rajoute un nouvel ossuaire apparu en 2002 chez un particulier et dont il prétend qu'il s'agit de l'ossuaire manquant, le dixième de la Tombe de Talpiot.
Cet ossuaire porte l'inscription, en araméen : "Jacques, fils de Joseph, frère de Jésus". Troublant. Sauf que… le propriétaire de l'ossuaire, un collectionneur de Silwan, un quartier à l'est de Jérusalem, affirme qu'il a acheté l'ossuaire avant que le tombeau ne soit découvert à Talpiot.
L'authenticité de l'inscription a été vérifiée au microscope électronique.
Quant à l'araméen, il n'a été utilisé pour les inscriptions sur les ossuaires, de l'an - 20 à l'an 70 (or Jacques, dit le Juste, dit le frère de Jésus, à été lapidé en l'an 63).
Les universitaires israéliens font valoir que ces trois noms, Ya'akov, Yosef et Yeshua, étaient courants à cette époque mais "la probabilité pour que les trois prénoms sortent dans cet ordre de filiation est très réduite", estime André Lemaire, philologue et épigraphiste à l'École pratique des Hautes études de Paris.
Le chercheur français se fonde aussi "sur la grande rareté de la mention d'un frère sur un ossuaire "et il faut donc qu'il y ait une raison spéciale à cela.
Sur des milliers d'ossuaires, ajoute-t-il, on ne connaît qu'un autre cas où trois prénoms sont gravés ensemble.
Ce qui prouve que les restes appartiennent au membre d'une famille renomée".
Jacobovici, pour sa part, a surnommé l'autre tombeau, "le Tombeau de la Résurrection".
Il abritait, selon lui, les dépouilles des premiers disciples et les vestiges de l'iconographie chrétienne des premiers siècles.
Il en veut pour preuve qu'on a retrouvé une gravure sur le côté de l'une des boîtes funéraires représentant selon lui Jonas sortant d'une baleine.
Hypothèse battue en brèche jeudi par le Professeur Kloner qui n'y voit qu'un vase ou une amphore, tels ceux qu'on trouve régulièrement dans les tombes antiques.
On a empêché Jacobovici qui voulait argumenter, de parler.
Car Simha Jacobovici semble être le poil à gratter du petit monde de l'archéologie.
L'an dernier, il a annoncé qu'il avait trouvé ce que pouvait être les "clous de la crucifixion de Jésus", accusant l'establishment israélien d'ignorer leur importance.
Jacobovici se présente comme l'apôtre de la vérité sur le christianisme primitif.
C'est pourquoi, il se croit victime d'une double persécution, de la part de l'establishment israélien d'une part - qui voudrait minimiser les traces de la présence chrétienne en Israël - et par les chrétiens d'autre part (qui ne veulent pas voir leurs croyances religieuses minées par des preuves historiques).
Il accuse donc ses détracteurs d'être des "agents dormants de la théologie chrétienne se faisant passer pour des universitaires".
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